Homo Sapienne, Niviaq Korneliussen

Portrait de la jeunesse groenlandaise. Personnages que l’on découvre chez eux ou à une fête. Récits construits en parties : à chacune son narrateur. Monologues intérieurs puissants. Des histoires d’amour qui se terminent, à décrire avec une violente justesse la mort des sentiments, l’ennui, la colère, le dégoût de l’amour de l’autre. Des histoires d’amour qui naissent, une rencontre à une soirée, une fille magnifique, le « courant passe », l’électricité palpable à chaque mot. Le besoin de fête, d’alcool, de bruits, de mouvements, pour oublier que ce pays est une prison, cloisonne, n’offre pas de perspective, tourne en rond.
La sexualité, le questionnement du genre, fait avec naturel, évidence, mais sans fermer les yeux sur le rejet, parfois, des parents, d’une famille qui nous ferme la porte, et une autre qu’on se crée, avec qui on est soi. Continuer la lecture

Manhattan Murmures, Giacomo Bevilacqua

manhattan murmures bevilacqua

Sam est photoreporter, pour se guérir d’une lourde peine, il part s’isoler à New York. Il aime cette ville, il y a une partie de son enfance, un pied à terre. Il espère s’y reconstruire. Son ami et associé lui lance alors le défi d’y rester deux mois sans prononcer un seul mot. Sam accepte. Armé de son appareil photo, un casque sur les oreilles, il sillonne la ville, prend des clichés, et ne communique qu’un minimum avec les gens, et toujours par bouts de papier.
Sam trouve du réconfort dans cette structure rigide, il aime compter les choses, avoir des repères stables.
Sam est aussi un photographe particulier : quand il prend une photo, il ne regarde jamais sur son écran à quoi le cliché ressemble, il ferme les yeux, et enregistre le cliché dans sa mémoire. Une mémoire infaillible.
Puis il va faire développer ses photos.
Sauf que cette fois, trouble, sur une dizaine de photos la silhouette d’une femme, toujours la même, rousse et longiligne. Et il ne se rappelle jamais l’avoir croisée, et encore moins photographiée.
Il décide de retourner dans les lieux où elle est apparue.

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Une bouche sans personne, Gilles Marchand

Un comptable plabouche sans personnenqué dans sa routine, son petit appart parisien, sa petite vie solitaire, ses habitudes rassurantes, et derrière son écharpe, se raconte.
Ça paye pas de mine au début. On se laisse faire. L’écriture est fluide, sympa. Le regard sur les autres est juste ce qu’il faut de piquant, méfiant, et drôle, et triste. On sent évidemment le truc plus profond qui vient titiller la curiosité.
Parce que le type, il cache un truc sous son écharpe, une malformation, une cicatrice, une plaie. Quelque chose de Secret, du passé enfoui.

Il retrouve ses potes tous les soirs, ou presque, au café. Quatre solitaires qui boivent des cafés arrosés de whisky, discutent (ou pas), tapent le carton (ou pas), se confient (peu). Lisa, la barmaid si jolie et pleine d’attentions. Thomas, qui croit avoir des gosses qu’il n’a jamais eu. Sam qui reçoit des lettres de sa mère décédée.
Le comptable, lui, ne s’est jamais confié sur rien de sa vie privée. En 10 ans. Ils n’ont jamais rien demandé. Puis un jour, l’écharpe se retrouve imbibée de café. Il ne peut envisager de l’ôter, il préfère fuir.
Quand il reviendra au bar, les questions vont surgir. Et… il va se décider à parler. A raconter. Se raconter. Continuer la lecture

L’avancée de la nuit, Jakuta Alikavazovic

avancee de la nuit alikavazovicPaul, un étudiant classique, tranquille, avec ses potes, ses études et ses petits boulots. Qui a une petite honte refoulée d’être d’un milieu modeste.

Il bosse la nuit dans un hôtel de la chaîne Elisse. Et y fait la connaissance d’Amélia. Fille richissime, qui vit à l’hôtel. Fille à la chevelure flamboyante. Fille mystérieuse et magnétique. Fille écorchée, sombre, et volatile. Comme un papillon de nuit.
La nuit, l’obscurité, ce qui va leur permettre de se trouver, de se réunir. Ce temps où tout devient force et intensité. Pour le meilleur et pour le pire.

L’avancée de la nuit parle d’amour, d’amour complexe, de destruction, de solitude. De la guerre (Bosnie). Des racines (du mal ?) : les mères absentes, en fuite ou décédée, dont la disparition a creusé le coeur de Paul et Amélia, a créé un déséquilibre, un creux au bord duquel ils se tiennent. Ou sombrent. Continuer la lecture

Les attentifs, Marc Mauguin

Les attentifs, marc mauguin, robert laffont[Dédicace le jeudi 9 mars 2017, 18h30]

Marc Mauguin aime les tableaux d’Edward Hopper, à les contempler tant et tant que des histoires en sont nées.
A travers douze nouvelles, l’auteur donne vie aux tableaux du peintre américain. Point de départ, une toile, reproduite en début de nouvelle. La suite, Marc Mauguin le tisse, et au fil des mots, met en mouvement les corps, les regards, les pensées dans des atmosphères sensibles, mélancoliques, et incisives à la fois.  Continuer la lecture