Protocole gouvernante, c’est avant tout un style. À la deuxième personne du pluriel, un livre sous forme de manuel, de marche à suivre, de guide, d’oracle, pour la gouvernante entrant en poste. Des chapitres courts, des étapes, des rites, des épreuves, que la gouvernante suit à la lettre pour intégrer la famille, y faire sa place, inspirer la confiance, et distiller, dans l’ombre, l’anomalie, le grain de poussière dans le rouage, l’eau sous le parquet jusqu’à ce qu’il se gondole légèrement… et empêche la porte de se refermer.
« vous finirez ce chapitre […] et vous attendrez le lendemain, parce que c’est ce qu’il faut faire, c’est ce que vous devez faire, […] attendre que tout finisse par arriver, et que tout arrive dans le bon ordre. »
Guillaume Lavenant livre un premier roman à l’atmosphère unique, immersive et complètement opaque. Le lecteur se retrouve captivé et perdu, obligé de suivre lui aussi le Protocole.
Le style est le point fort et le point faible de ce roman, car oui, il plonge directement le ou la lectrice dans une atmosphère étrange, mystérieuse et pleine de suspens, mais il crée une sorte de monotonie aussi. Ce qui colle au sujet (une gouvernante, qui répète les gestes, son quotidien réglé comme un « coucou suisse », un brin ennuyant).
Sauf que Lavenant, insère à chaque fois une nouveauté, un élément, un grincement. On avance, doucement, presque imperceptiblement, mais on avance.
L’auteur cultive également un total mystère. On ne sait pas qui est cette gouvernante, on ne sait rien de ce qu’elle pense. Tout est vu à travers son Protocole. Il y a forcément un côté impalpable, distant, qui peut gêner.
Un livre qui accroche et intrigue.