Nouvelle-Orléans, post tempête et cataclysme de Katrina. Claire De Witt, La Meilleure Détective du Monde, accepte une enquête. Elle retourne dans une ville qu’elle a essayé d’oublier. Une ville où Constance l’a formée au boulot, où elle s’est imprégné du livre du Grand Détective Silette, où elle fait ses premiers pas et où elle a laissé beaucoup de doux souvenirs, et de grande tristesse.
Mission: retrouver la trace d’un procureur hyper cool, hyper sympa, apparemment pas trop corrompu (dans cette ville c’est compliqué), qui aurait disparu pendant les dernières inondations (mort?). Il laisse derrière lui un empire, une fortune, et un neveu tout… désemparé.
Claire De Witt est intelligente, sensorielle, mystique, instinctive. Elle laisse les indices venir à elle, elle questionne, mais laisse les témoins mijoter, elle sillonne la ville, hume l’air ambiant, évite les balles comme une chatte, et a un sang froid ahurissant.
Elle n’hésite pas à prendre quelques substances illicites, à suivre la voix de ses rêves, à s’aider de l’interprétation de les Héxagrammes (clique ici pour en savoir plus). Sourire décalé en coin, forte hyper-sensibilité enveloppée d’ironie, elle attire rapidement l’antipathie. Trop intelligente, trop secrète, trop prudente, aux méthodes étranges, elle inquiète et perturbe.
Un personnage superbe, donc !
Sara Gran sème plein de choses sur Claire De Witt, d’où elle vient, comment, pourquoi, et laisse beaucoup de zones d’ombre qu’on aimerait voir se dévoiler (peut-être dans les prochains tomes).
Ce n’est pas une détective borderline comme on en voit beaucoup : violente, bourrée du matin au soir, agressive, ou se mettant hors la loi. Non. Claire De Witt est borderlline, mais en douceur (même si elle sait user de ses poings et de ses pieds), elle louvoie, manipule doucement les gens et les indices, observe, ressent, s’imprègne de ce qui se passe autour d’elle.
La Nouvelle Orléans est aussi un personnage à part entière dans ce livre : le quotidien de ces gens pauvres, qui n’ont plus rien du jour au lendemain, pour qui les aides arrivent tard, ou jamais. Beaucoup de jeunes qui traînent, se droguent, portent des vêtements trop amples pour y planquer une artillerie. Des jeunes qui se cherchent des repères, une famille, un équilibre, dans un monde en ruine.
L’enquête, par la façon dont elle est menée, est intrigante. La part de Hasard ponctue très judicieusement l’histoire, la permettant d’avancer, de reculer, de bondir, de patienter. Une enquête qui dévoile beaucoup plus sur l’humain et ses parts d’ombre que sur une théorie facile et manichéenne de méchant/gentil.
Un très très très bon roman policier, comme ça faisait vraiment longtemps que je n’en avais lu !
Trad. Claire Breton
(2012 – ed. points 2016)