Après la belle réussite de la série tirée du roman, revenons au livre de Margaret Atwood, une œuvre magistrale.
Un monde futuriste réduit à un quartier, un district. Une société qui fonctionne en caste. La natalité est au plus bas (catastrophe nucléaire entr’autres, qui a provoqué l’infertilité ou des bébés mal formés, voir mourant quelques jours après l’accouchement).
Les castes :
Les Tantes qui élèvent les Servantes Écarlates. Vêtues de marron.
Les Servantes Écarlates qui sont offerts à un riche foyer comme mère porteuse (en espérant que ça marche). Vêtues de rouge.
Les Martha qui sont des domestiques. Vêtues de vert.
Les Gardiens assimilés à de la milice.
Les Yeux (qui surveillent tout le monde sans se faire remarquer).
Les Épouses. Vêtues de bleu.
Les Hommes.
Les éconofemmes (épouses des hommes pauvres). Vêtues de noir.
Les Antifemmes (toutes femmes rejetées par la société pour toutes sortes de prétexte)
Atwood a une écriture particulière, à la fois elliptique et laconique, à faire des mots des symboles, à leur donner une force qui parle, utilisant des images qui frappent, qui perturbent, et en même temps très facile à lire.
Parce qu’en plus Atwood joue avec le lecteur, le manipule quelque peu (mais avec finesse) et maintient un suspens terriblement prenant tout le long des pages.
On peut donc l’avaler en une bouchée, goulûment, et avec gourmandise, en sentant que c’est bon en qualité mais qu’on en veut plein en quantité. Alors on tourne et tourne les pages.
On peut le déguster, lire et relire quelques passages, admirer la tournure de phrase, l’impact des mots et des images si parfaitement choisies.
Quoiqu’il en soit, on avance, on continue, on s’accroche.
Comme on tiendrait très fort la main de la seule personne qui peut nous sauver.
On est dans la peau de Defred, très près, dans son intimité (pour autant qu’elle en a une).
Defred n’a plus d’identité, n’a plus droit à rien, si ce n’est survivre jusqu’à tomber enceinte et enfanter. Ce livre est son témoignage. Une vision des choses à la fois très restreintes (on apprend peu sur ce qui ne la concerne pas directement, le fonctionnement du monde est un mystère étouffant où se planque la menace) et très visuelles.
Une société qui fait peur, et qui fait écho à beaucoup de choses qui se sont passées et, malheureusement, se passent encore.
Un livre ultra féministe, oui. Mais ultra humain aussi (les hommes ne sont pas mieux lotis s’ils ne sont pas haut placés).
Un livre sombre, glauque, triste à mourir.
Mais tellement riche d’écriture et de fond !
Pavillons poche Robert Laffont (08.06.17)
Traduction : Sylviane Rué
Première édition : 1985
Suite parue en 2019 : Les testaments
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